Comme d’accoutumée, le hall marchand de Belegost ne désemplissait pas. Nains, Hommes et Elfes se croisaient en un flot incessant de voyageurs et de trains de marchandise. Un joyeux brouhaha faisait écho contre les parois de pierre, étrange musique composé de Sindarin aux accents parfois chantant, parfois grognant. Les frusques de chacun étaient également un mélimélo de couleurs et de textures, si bien que l’on pouvait parfois savoir d’où venait quelqu’un simplement aux couleurs de son habit.

Et bien peu semblent venir du Dorthonion.

Le cœur d’Azaghâl se serra à cette pensée. La chute du plateau n’était encore que trop récente. Lui-même en était revenu indemne et nombre de créatures de Morgoth avait péri sous les coups de Darnmanadh mais la cité naine avait payé un bien lourd fardeau. Ils n’étaient qu’une poignée à être revenus de la bataille alors que les cendres fumantes s’étaient déposées sur le corps de centaines de Naugrims.

Comme au temps de Dagor Bragollach, l’ennemi était victorieux. D’une victoire chèrement acquise et qui semblait l’avoir obliger à marquer un temps d’arrêt… Mais combien de temps survivrait le Beleriand si le Noir Ennemi infliger une si cuisante défaite à ses adversaires chaque décennie ?
Secouant la tête, le roi nain chassa ses sombres pensées. Il n’était pas là pour ça. Atteignant enfin le quartier des forgerons, Azaghâl se mit en quête d’un atelier en particulier.

L’anniversaire de son épouse approchait à grand pas et le seigneur Naugrims voulait pour elle un cadeau spécial. Un présent digne de la reine de l’un des plus puissants royaumes du Beleriand.

Hélas les déconvenues récentes et les affaires courante ne lui laisser encore et toujours que trop peu de temps pour les métiers de la forge. Et l’orfèvrerie était plus chronophage encore. Aussi lui fallait-il délégué à regret cette tâche d’importance. Alors qu’il aurait pu s’adresser aux plus grands bijoutiers de Nogrod et de Belegost, il avait pourtant décidé de se diriger vers un atelier qui ne payer guère de mine. Un atelier qui semblait même être éviter par les autres nains tant la personne qui y vivait leur paraissait étrange.

Pourtant le roi avait déjà vu la forgeronne à l’œuvre. Et il avait entière confiance en son talent. C’est donc d’un pas sur et altier qu’il franchit la porte, non sans attirer le regard curieux d’un grand nombre de ses sujets. Tant mieux, peut être les mentalités évoluerait-elle un peu s’il montrait l’exemple.

A l’intérieur, pas âme qui vive. La décoration était pour le moins sobre, si ce n’est spartiate. En contradiction total avec celle des grandes maisons de joailleries. Mais sur chaque objet ouvragé, un œil avertit pouvait voir la trace du talent brut. Et il n’y avait pas d’œil plus avertit que celui du roi à Belegost. La jeune naine se rendait-elle compte de l’or que Mahal avait mis entre ses mains ? Elle n’avait pas la maitrise d’Azaghâl, ce n’était pas vantardise que de le reconnaitre, mais le roi était sur d’une chose : elle avait le potentiel pour le dépasser. Et peut-être serait-elle alors la plus grande forgeronne de l’histoire de la cité. Peut-être aussi grande que Telchar lui-même.

Mais pour l’heure, fallait-il encore que la forgeronne apparaisse.

« Karellia ? Êtes-vous-la ? J’ai besoin de vos services pour l’anniversaire de mon épouse ! »